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Rencontre avec Amma en Inde

DE PASSAGE DANS LE KERALA, CLOTHILDE NOUS RACONTE SA RENCONTRE AVEC LA CÉLÈBRE FIGURE HUMANITAIRE ET SPIRITUELLE INDIENNE

13 février 2019

Rencontre avec Amma en Inde

(Crédit : Clothilde)

De passage à Kochi dans le sud de l’Inde, notre amie Clothilde entend parler d’Amma, cette femme indienne exceptionnelle qui embrasse les gens et distribue son amour inconditionnel à travers le monde. Son ashram n’étant qu’à une centaine de kilomètres, elle décide d’y passer quelques jours pour les fêtes de fin d’année. Si elle pratique le yoga depuis plusieurs années et s’intéresse au développement personnel, Clothilde n’était jamais allée dans un ashram, un lieu spirituel fondé autour d’un maître, le guru, qui transmet son enseignement aux élèves. Elle nous livre un témoignage sensible et personnel de cette expérience unique qui donne envie de découvrir d’autres façons d’être au monde.

Amma, Sri Mata Amritanandamayi Devi, « mère de la béatitude immortelle », est considérée dans son pays comme Mahatma : une grande âme. Née dans une famille pauvre de pêcheurs au Kerala en 1953, Amma a trouvé seule le chemin de la méditation et de la dévotion, aidant dès l’enfance les plus démunis, étreignant des personnes qui lui étaient étrangères pour les réconforter. Elle est aujourd’hui à la tête de l’un des plus larges réseaux d’œuvres caritatives en Inde, l’ONG Embracing The World qu’elle a créée et qui jouit depuis 2005 d’un statut consultatif auprès du conseil économique et social de l’ONU.

L’ashram d’Amritapuri a été bâti dans le village de naissance d’Amma, sur une petite île entre les magnifiques lagunes du Kerala et la mer d’Arabie. Deux temples et plusieurs bâtiments ont successivement été construits pour accueillir les disciples vivant sur place et les visiteurs de plus en plus nombreux. Le lieu est un exemple parfait du vieil adage indien Vasudhaiva Kutumbakam qui veut dire « Le monde entier est une seule famille ». A n’importe quel moment de l’année, tout le monde est le bienvenu pour une plus ou moins longue durée, sans distinction de genre, d’origine, ou de religion.
Le tarif est très abordable, 250 roupies par jour, soit 3€, pour le logement et 3 repas indiens. L’ashram n’est pas un hôtel, mais plutôt un lieu de vie en communauté où chacun est responsable de laver sa vaisselle après les repas, de nettoyer sa chambre quand il la quitte, de trier ses ordures. Le recyclage est très présent dans l’ashram, il existe une quinzaine de poubelles différentes pour le tri, ce qui est assez avant-gardiste pour l’Inde.

Après un passage à l’accueil international, je m’installe dans une chambre de 4 personnes avec une petite salle de bain. Il parait que d’habitude l’ashram est plus calme, mais en raison de la fête du nouvel an et de la présence d’Amma, nous sommes près de 7000 personnes au moment de mon séjour. C’est un lieu extrêmement vivant et ouvert sur le monde, il y a des familles, des enfants, des personnes de toutes nationalités qui vont et viennent en fonction de leurs activités ! La plupart des gens sont totalement habillés en blanc, les femmes ressemblent à des anges avec leurs saris clairs et fluides… mais le blanc n’est pas obligatoire, surtout pour les personnes de passage.

Rencontre avec Amma en Inde

Crédit : Clothilde

Le jour de mon arrivée, je participe à une présentation en français de l’ashram et de son fonctionnement. C’est Mitra qui est mon guide (ici les gens ont des noms spirituels qui sont donnés par Amma), elle vit ici depuis 8 ans et rentre en France 2 mois par an. Nous avons une présentation d’Amma, puis des différentes actions humanitaires qu’ETW réalise à travers le monde. L’ONG est particulièrement active dans le secours d’urgence aux populations victimes de catastrophes naturelles. Les bénévoles d’Amma se rendent sur les lieux du désastre pour distribuer de la nourriture, reconstruire les logements, prodiguer des soins médicaux… L’éducation et le travail, la protection de l’environnement, la recherche scientifique et la revalorisation de la femme sont autant de causes défendues par l’organisation.
Puis, pour la visite du lieu, c’est Ganganath qui prend le relai, il est architecte entre la France et l’Asie et vient se ressourcer ici pendant 3 mois chaque année depuis 10 ans.
L’ashram est comme un petit village autour de l’Auditorium et du temple Kali où ont lieu les moments forts de la journée. Il y a une bibliothèque, des magasins de vêtements neufs ou d’occasion, de souvenirs, une librairie, un mini supermarché et une pharmacie ayurvédique… En plus de la cantine indienne gratuite, il y a d’autres options pour les repas : une cantine occidentale, le « Café » avec un large choix de salades, pizzas, gâteaux et boissons, un snack indien et différents stands (noix de coco fraîches, jus de fruits frais, glaces…).

L’ashram propose également de nombreuses activités comme des cours de yoga, de méditation, de sanskrit (langue des textes religieux hindous), de Vedanta (philosophie indienne). Mais aussi des retraites silencieuses de 5 ou 9 jours, des soins ayurvédiques, des cours de chant, de musique et des stages divers animés par la communauté et dont les bénéfices sont reversés aux œuvres caritatives d’Amma.

L’ashram a une routine quotidienne à laquelle les visiteurs sont libres de se joindre ou non. Je ne me lève pas pour les chants qui ont lieu à 4h50 du matin, mais j’assiste aux cours matinaux de Hatha Yoga dans une vaste salle en hauteur, avec de grandes baies vitrées donnant sur les voies navigables et les cocotiers.

Après le petit déjeuner, je pars à la plage avec mon café. En sortant de l’ashram, on trouve une petite plage de pêcheurs où chacun pratique ses activités (yoga, qi gong, méditation, lecture…). Il est interdit de se baigner en raison des lames de fond qui pourraient vous emporter au large, mais la lumière est très belle à tout moment de la journée. Ensuite je me rends au temple Kali pour méditer, mais, n’étant pas encore une pratiquante assidue, je suis distraite par les cours de chant et les différentes personnes qui prient devant la déesse du temps, mère destructrice et créatrice.

Rencontre avec Amma en Inde

Crédit : Clothilde

Après la « méditation », en général, je vais chercher une noix de coco fraîche. Il faut préciser si vous souhaitez la boire, la manger, ou les deux. Le vieil homme vous la choisit avec une main de maître et la prépare en quelques mouvements : une petite ouverture pour la boire, puis, quand elle est terminée, il vous l’ouvre en deux et coupe un morceau de la bogue qui sert de cuillère pour manger l’intérieur. Délicieux et recommandé pour ses nombreux bienfaits…

Ensuite, la plupart du temps, je m’installe sur une table ronde à l’ombre des arbres pour lire Le secret de la paix intérieure, acheté à la libraire locale, et pour mieux comprendre les enseignements d’Amma. Mais, bien souvent, je me joins aux conversations alentour. On entend souvent parler français et il y a beaucoup d’occidentaux de manière générale. Juliette, la sœur de mon copain César, sur laquelle je suis tombée tout à fait par hasard le premier jour ! Fan d’Amma, elle l’avait déjà rencontrée en Europe et voulait découvrir l’ashram pendant quelques jours mais elle y passe finalement 3 semaines ! Elle me parle de signes, de fluidité des rencontres, de synchronicité et de découvertes. Maria-Claudia, franco-mexicaine qui a quitté Paris et ses grands enfants pour voyager à travers l’Inde puis l’Amérique du Sud en quête de spiritualité… Jonathan, un américain qui redécouvre le lieu après 10 ans d’absence, ce qui n’empêche pas notre conversation d’être souvent entrecoupée par ses retrouvailles avec d’anciennes connaissances ! Tout à coup, je vois l’ashram comme une immense famille ou les gens se rencontrent, se croisent, se retrouvent, tous unis par l’amour maternel d’Amma.

Ensuite viennent l’heure du déjeuner puis des Seva. Il est possible de réaliser un ou plusieurs Seva dans la journée, il s’agit d’activités bénévoles qui garantissent le bon fonctionnement de l’ashram ; elles sont une part importante de la pratique spirituelle des résidents et des visiteurs. Il peut s’agir de servir dans les différents restaurants ou stands, de couper les légumes et les herbes nécessaires à la préparation des différents plats, ou encore de traduire les workshops proposés, de laver et d’étendre le linge, de gratter les graines de Rudrashka qui servent à la confection de mâlâ, chapelet utilisé pour la récitation des mantras. Pour ma part, j’ai aidé à façonner des pains spéciaux pour le dîner du 31 décembre. En plus de servir la communauté, les Seva permettent de rencontrer de nouvelles personnes et de découvrir de nouvelles activités !

En fin d’après-midi je vais souvent contempler le magnifique coucher de soleil sur la plage, puis je rejoins la méditation avec Amma. Ici, le but étant d’être le plus proche d’Amma, pendant le plus de temps possible, les dévots posent leur tapis dès le matin pour réserver leur place à la méditation de 17h. En général, la méditation se passe dans l’Auditorium mais quand celle-ci a finalement lieu sur la plage c’est un branle-bas de combat pour récupérer son tapis et courir là-bas pour récupérer une place près d’Amma avant les autres !!! L’assemblée est recueillie et bienheureuse. La méditation avec Amma est vivante : entre les périodes de silence, elle pose des questions aux enfants, donne son enseignement, des conseils, raconte des histoires…
Alors que je commence à réfléchir à l’endroit où j’irai dîner, il est 18h et les bhajans commencent. Une quinzaine de chanteurs et de musiciens jouent ces chants dévotionnels à l’intention des divinités hindouistes. Certains jours, Amma chante et c’est très puissant, impressionnant. Elle danse presque, vit ce qu’elle chante. Dans nos églises occidentales, une expressivité telle n’existe pas, ça me rappelle la liberté les chants gospels dans les églises des chrétiens évangéliques aux États Unis.

Rencontre avec Amma en Inde

Crédit : Clothilde

Recevoir le Darshan d’Amma est l’une des raisons principales de la venue des visiteurs. Darshan signifie « être en présence de la divinité ». En effet, beaucoup pensent qu’Amma est la réincarnation d’une déité. Le Darshan est le moment où Amma vous prend dans ses bras, c’est très furtif mais si vous souhaitez lui poser une question, lui demander une bénédiction, un conseil (dois-je m’engager dans ce travail ? dois-je me marier avec telle personne ? …), Amma sait et elle prend le temps de vous répondre.

Quand Amma n’est pas en tournée à travers le monde, elle séjourne à l’ashram et donne le Darshan 4 jours par semaine à partir de 11h du matin jusqu’à très tard le soir. Il est incroyable de voir cette femme passer la journée entière à étreindre les gens pour les réconforter et distribuer son amour.

Le Darshan est tout un rituel, il faut récupérer un token (qui n’est pas donné systématiquement), vous avez plus de chance de l’avoir si c’est votre jour d’arrivée, de départ, d’anniversaire, ou si vous n’avez pas reçu le Darshan depuis longtemps, mais il est tout de même facile de négocier ! Pour un séjour de courte durée il est possible de recevoir le Darshan chaque jour… Le token en main, plusieurs étapes se succèdent, tandis que l’on progresse de chaises en chaises dans l’Auditorium au fur et à mesure que la queue avance. On arrive enfin sur le podium, il faut se laver le visage, rendre le token et avancer à genoux. Amma est entourée d’une dizaine d’assistants qui cadrent le Darshan. Ils dirigent mes mains sur les accoudoirs du fauteuil d’Amma, prennent ma tête et la posent sur la poitrine d’Amma. Amma sent bon, je reste un peu de temps contre elle, puis elle me murmure quelque chose, me presse une dernière fois et me donne le Prasad (un bonbon à l’orange et un petit sachet de cendres). Après le Darshan il est possible de rester sur le podium pour être proche d’Amma et ressentir son énergie. Pour ma part, j’observe avidement Amma et ceux qui reçoivent le Darshan. Les gens sont très recueillis, dans une attente contemplative, puis très émus après le Darshan. Amma quant à elle n’est pas très concentrée et en grande conversation avec ses assistants, rigolant parfois avec eux, ne regardant pas toujours les personnes qu’elle étreint. C’est un peu décevant mais comment lui en vouloir ? Ici les gens parlent beaucoup du Darshan. Comment était Amma ? Est ce qu’elle t’a parlé ? Qu’as-tu ressenti la première fois ? La deuxième fois ? La dixième fois ? Certaines personnes disent qu’elle plante des petites graines d’amour en nous, qui mettent plus ou moins longtemps à se développer, qu’il est normal de ne rien ressentir en particulier, mais que le cœur va s’ouvrir petit à petit !

par Clothilde

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