21 juillet 2018
Crédit : Anne Du Fourmantelle / Mollat
Il y a un an, le 21 juillet 2017, Anne Dufourmantelle succombait à un arrêt cardiaque après s’être jetée à l’eau pour sauver de la noyade le fils d’une amie, sur une plage du sud de la France. Psychanalyste, philosophe et romancière, celle qui faisait « l’éloge du risque » est morte en vivant comme elle le préconisait.
Docteur en philosophie et diplômée de Brown University, Anne Dufourmantelle enseignait dans une école d’architecture et donnait un séminaire à l’Institut des Hautes Études en Psychanalyse à l’ENS. Elle dirigeait une collection d’essais chez Stock intitulée « L’autre pensée » et exerçait en tant que psychanalyste à Paris.
Dans son Éloge du risque, paru en 2011 chez Payot, elle disséquait des situations de la vie habituellement perçues comme risquées – la passion, la dépendance, l’addiction, l’inconnu, la solitude, la révolution – et d’autre pas forcément considérées comme telles, à savoir la liberté, la beauté, la famille, l’amitié, la parole, l’avenir… Elle y commentait la célèbre formule du poète Friedrich Hölderlin : « Là où croît le péril, croît aussi ce qui sauve », estimant que le temps du risque serait le contraire miraculeux de la névrose. Pour elle l’essentiel de toute forme d’éthique devait en effet résider dans le fait de prendre le risque d’aimer et de vivre afin de s’extirper de toute forme de dépendance.
« Risquer sa vie” est l’une des plus belles expressions de notre langue – écrivait-elle. Est-ce nécessairement affronter la mort – et survivre… ou bien y a-t-il, logé dans la vie même, un dispositif secret, une musique à elle seule capable de déplacer l’existence sur cette ligne de front qu’on appelle désir ? »
Il va sans dire que ses propos ont pris une tonalité nouvelle depuis sa mort tragique. Faisant preuve d’un courage héroïque, Anne Dufourmantelle n’a pas hésité à prendre le risque de se jeter à la mer, de périr dans les flots, pour sauver un enfant de la noyade.
On ne peut que vous conseiller la lecture de cet essai inspirant mais également de ses deux romans. Il semble en effet que son activité de romancière ait revêtu une importance particulière pour celle qui avait déjà publié de nombreux ouvrages de philosophie et de psychologie car sa fille Clara, dans le bouleversant hommage, qu’elle lui a rendu dans Libération le 30 juillet dernier, résumait ainsi la vie de sa mère : « Tu as publié ton premier roman, tu as aimé follement et toujours comme tu le voulais toi. ». L’Envers du feu, ce premier roman paru en 2015 aux éditions Albin Michel, a été suivi par la publication posthume en janvier 2018 d’un second roman intitulé Souviens-toi de ton avenir.
Libre, passionnée, amoureuse, mère aimante, courageuse, intellectuelle, belle, brillante, Anne Dufourmantelle fait partie de ces femmes dont la pensée restera toujours vivante. Ses écrits et ses actes forcent le respect et sont plus qu’inspirants.
Par Laura / Bouton d'or, Elles créent